L’écopsychologie...
L’écopsychologie part du principe que, pour œuvrer au changement de cap requis, une nouvelle alliance entre l’écologie - dont le champ s’étend au cosmos – et la psychologie – qui s’occupe de la psyché humaine – est nécessaire. D’un autre côté, l’écologie a besoin de la psychologie. L’écologiste australien John Seed, fondateur du Rainforest Information Centre, le reconnaît :
Il est évident pour moi qu’on ne pourra sauver les forêts une à une, ni d’ailleurs la planète un problème après l’autre. Sans une profonde révolution dans la conscience humaine, toutes les forêts vont bientôt disparaître. Il me semble crucial, à cet égard, que les psychologues qui se mettent au service de la Terre, aident les écologistes à acquérir une compréhension plus subtils de comment opérer un changement profond du cœur et de l’esprit humain.
Figure de proue de l’écopsychologie, l’historien Theodore Roszak appelle les militants de l’environnement à s’ouvrir davantage à une dimension d’intériorité, à embrasser la psyché humaine comme indissociable de la biosphère, et à prendre en compte ce que les psychologues peuvent leur apporter dans la compréhension des ressorts intimes de l’être humain, notamment par rapport aux processus et valeurs sous-jacents aux mauvaises habitudes environnementales. A cet égard, écrit-il, il importe de ne pas s’arrêter aux logiques habituelles de dénonciation, de culpabilisation et de peur pour réaffirmer l’essentiel, qui est de s’ouvrir à l’amour de la terre, de la vie et de sa beauté. Cette ouverture ne proviendra pas de la seule force de la raison et de l’information, mais d’une transformation intérieure : « Nous devrons ressentir en nous ce dont la Terre a besoin comme si c’était notre propre désir le plus intime. »
De l’autre côté, la psychologie a besoin de l’écologie. En effet, « chercher à soigner l’âme sans référence au système écologique dont nous sommes une partie intégrante, constitue une forme d’aveuglement autodestructeur ». Les maladies de la psyché ne sont pas étrangères à la crise écologique et les maux de la Terre sont sources de troubles psychologiques. Tous ces dysfonctionnements participent, à des degrés divers, de la séparation entre l’être humain et la nature qui s’est cristallisée et accentuée avec la modernité occidentale, depuis la fin du XVe siècle. Il revient donc aux psychologues et thérapeutes d’œuvrer à transformer leur théorie et pratique en introduisant dans leur travail la relation homme-nature et le contexte écologique de la vie humaine.
C’est précisément ce que vise l’écopsychologie, selon Roszak :
J’ai crée ce terme non pas avec l’intention de lancer une nouvelle école de psychologie, mais plutôt avec l’espoir que les relations environnementales deviendraient une composante de chaque orientation thérapeutique, au même titre que les relations familiales.
Il s’agit de prendre conscience de la valeur précieuse de tous les êtres autres qu’humains, du rôle qu’ils jouent dans notre vie, de l’impact que leur dégradation peut avoir sur les individus et les sociétés. Cela suppose de regarder la Terre non plus simplement comme un objet d’étude, un stock de ressources ou un ensemble de paysages, mais comme l’habitat naturel de la psyché humaine. La nature est une forme de famille élargie dont nous sommes membres. Elle est une communauté biotique composée de sujets avec lesquels il est non seulement possible, mais nécessaire de développer des relations réciproques et harmonieuses.
Texte tiré du livre : Soigner l’esprit,
guérrir la Terre
Introduction à l’écopsychologie
Michel Maxime Egger